Dans le prolongement des volumes précédents, ce volume couvrant l'année 1617 et la première moitié de l'année 1618 (avant le Synode de Dordrecht) apporte des éclaircissements significatifs sur la pratique quotidienne de l'Eglise genevoise, ainsi que sur le fonctionnement des institutions dépendant étroitement de la Compagnie (Académie et Collège, Bourse française et Hôpital, Consistoire). A l'étranger, le schisme hollandais et les événements qui secouent la vallée de la Valteline préoccupent les pasteurs, alors que la controverse déclenchée par la publication en 1618 de la Genève plagiaire du père Coton, critiquant les traductions genevoises de la Bible en français, donne l'occasion aux professeurs Bénédict Turrettini et Théodore Tronchin de défendre « la diversité de translation » de l'Ecriture. Ces éléments et bien d'autres (bibliothèque du pasteur La Faye, etc.) sont servis par une annotation aussi abondante que soignée.

BULLETIN DE L'ASSOCIATION D'ETUDE SUR L'HUMANISME, LA REFORME ET LA RENAISSANCE, 55-55, 2002, P140-141 C'est un beau volume, relié en toile rouge, le dos et les plats gravés en lettres d'or, comme tous les volumes de cette collection. Mais qu'en est-il du contenu, en quoi peut-il être utile ou même nécessaire aux historiens et aux chercheurs en histoire littéraire ? Ce recueil des décisions de la Compagnie des Pasteurs serait assez austère si des notes dont nous admirons la précision et la somme de recherches qu'elles représentent ne nous invitaient à relier ces avis et ces décisions aux problèmes que posent par exemple des écoliers dont certains deviendront des pasteurs connus après avoir vécu une jeunesse agitée et d'autres resteront des marginaux « batteurs de pavé » « ribleurs de nuit ». Ce n'est pas une mince affaire que d'administrer le corps pastoral, de répondre aux demandes des paroisses - et bon nombre viennent de France - d'examiner la compétence des candidats en leur faisant lire et commenter un chapitre de l'Ancien ou du Nouveau Testament, de trouver de bons professeurs pour le collège et même de veiller aux bonnes mÅ“urs dans la ville : plusieurs femmes chargées d'enfants et abandonnées par leur mari font appel aux pasteurs pour qu'ils soulagent leur détresse en remettant dans le droit chemin le mari volage ou vagabond. Nous avons, dans ces registres, un miroir de la vie quotidienne et nous pouvons remarquer les difficultés d'une église

Il serait très intéressant pour nous de retrouver dans ces registres les noms de poètes ou de penseurs connus ; un index très riche (p. 453 à 482) favorise cette recherche, mais en dehors de théologiens célèbres : Luther, Calvin, Bèze, Viret, Zwingli je n'ai rien trouvé sur Agrippa d'Aubigné, rien sur Bernard Montméja, rien sur Pierre Poupe qui a été inspiré par son exil à Genève, rien sur Maisonfleur ou Simon Goulart, on cite le nom de Chandieu mais il s'agit de Pierre le fils d'Antoine de Chandieu le poète.
Il ne faut pas demander à ces registres ce pour quoi ils ne sont pas faits : nombre de poètes ou de penseurs sont morts avant 1617, d'autres comme Agrippa d'Aubigné (t 1620) achèvent leur vie ; d'autres enfin vivent tranquillement à Genève, ils ne figurent pas dans les délibérations du Consistoire. Ce beau livre si érudit et si concret témoigne de la vie d'une Eglise pauvre en biens matériels, préoccupée par les pays troublés qui l'encerclent et par les manÅ“uvres de reconquête qui la menacent. Elle a le souci de rester fermement unie au « Magistrat », c'est-à-dire à ceux qui gouvernent, tout en instaurant une rigueur morale conforme à la volonté du Seigneur.
- Marguerite Soulié