Entre 1691 et 1699, Pierre Bayle et Pierre Jurieu se sont affrontés devant le consistoire de l'Église wallonne de Rotterdam. Les accusations de Jurieu portent sur le plan politique, car il est convaincu que Bayle est l'auteur de l'Avis aux réfugiés, et sur le plan religieux, car il s'oppose à la philosophie de la tolérance proposée par Bayle dans le Commentaire philosophique ainsi qu'à la défense de l'athéisme développée dans les Pensées diverses. Cette querelle violente éclate au lendemain de la Glorieuse Révolution, qui paraît comme un des enjeux majeurs de la confrontation entre le Philosophe de Rotterdam et le fougueux théologien, car Bayle a été le protégé d'Adriaan Paets le républicain, ancien allié des frères de Witt et partisan de la négociation d'une paix durable avec la France, tandis que Jurieu est engagé auprès de la Cour de Guillaume III d'Orange, en qui il salue un « nouveau David », héros du protestantisme en Europe. En 1693, Jurieu obtient la destitution de Bayle de son poste de professeur à l'École Illustre de Rotterdam, mais Bayle survit grâce à son contrat avec l'imprimeur Reinier Leers pour la publication du Dictionnaire historique et critique. Les articles clés du Dictionnaire constitueront un nouveau champ de bataille entre les deux anciens amis : outre les « obscénités », le consistoire relève le caractère scandaleux de l'article « David » et le caractère hérétique des articles philosophiques consacrés au manichéisme, au pyrrhonisme et à l'athéisme. Les Éclaircissements de Bayle constitueront sa réponse à ces accusations.